• Even Dead Things Feel Your Love (Mathieu Guibé)

    Auteur : Mathieu Guibé 

    Paru aux : Editions du Chat Noir

    Date de parution : Mars 2013

    4ème page de couverture :

    Au terme de votre vie, à combien estimez-vous le nombre de minutes au cours desquelles vous avez commis une erreur irréparable ? De celle dont les conséquences régissent d’une douloureuse tyrannie vos agissements futurs jusqu’au trépas. Mon acte manqué ne dura pas plus d’une fraction de seconde et pourtant ma mémoire fracturée me renvoie sans cesse à cet instant précis tandis que la course du temps poursuit son inaltérable marche, m’éloignant toujours un peu plus de ce que j’ai perdu ce jour-là.

    Je me demande si notre dernière heure venue, les remords s’effacent, nous délestant ainsi d’un bagage bien lourd vers l’au-delà ou le néant, peu importe. Puis je me souviens alors qu’il s’agit là d’une délivrance qui m’est interdite, condamné à porter sur mes épaules ce fardeau à travers les âges, à moi qui suis immortel.

    L’amour ne devrait jamais être éternel, car nul ne pourrait endurer tant de douleur.

    Liens de Sang Tome 1 (Callie J. Deroy)

    Yem ou le combat d'une femme (Gilles Milo-Vacéri)

    La couverture m’a attiré de suite : seul le menton découvert, l’habit de cet homme d’une autre époque, pas de regard qui pourrait nous aiguiller sur qui est ce personnage principal laissant ainsi le loisir au lecteur de se poser des questions. A quoi peut-il ressembler en dehors de ce que l’illustrateur de cette couverture, en l’occurrence Alexandra V. Bach à bien eut l’obligeance de dévoiler, beaucoup et peu à la fois ? Une part de sombre oui, certainement, de mystère également… La couverture attire, donne l’envie de découvrir qui se cache derrière, parce que les mots de la quatrième sont à la première personne, parce que ces mots sont ceux de celui dont on ne voit pas le visage complet et qui pourtant donne tout un sens au fait que son regard reste caché : remords, souffrance, délivrance… Des mots qui ne restent pas vain dans roman et qui vont donner une ampleur, une vie propre à cet inconnu. Et que dire de la préface de Georgia Caldera, cette auteure connue pour « les larmes rouges » publié également aux Editions du Chat noir, elle donne un avant-goût de la profondeur de cet écrit, laissant entrapercevoir ce qui va nous tomber dessus.

    J’aimerais trouver les bons mots pour vous décrire ce tome, sans parler de ce qui s’y passe, cela reste une très belle découverte pour le lecteur. Ce que je peux dire, c’est que ce livre, je n’ai pas pu la lâcher tant qu’il n’était pas fini. C’est un vrai bijou tant dans l’écriture que dans l’histoire. L’univers est planté dans un décor du XIX - XX ème siècle. Les émotions et sentiments de chacun des personnages sont exploités jusqu’à la dernière goutte.  L’écriture de l’auteur est tout simplement merveilleuse, un mélange de bonté et de désespoir, de sombres desseins et d’espoir. Chaque mot, chaque phrase, à chaque page, j’avais cette impression de voir les actions se passer sous mes yeux, comme dans un film. Imaginant le héro parler de ce qu’il à fait, vu, crée durant des décennies. Imaginant la femme avec son manteau et ses hauts talons dans les rues, sans oublier les cadavres décimés par endroits, ou tout simplement le magasin de jouet, qui serait qualifiés d’ancien à notre époque, mais si bien présenté. J’ai été subjuguée par les détails, par la personnalité de chacun des personnages, que se soit notre héro ou les personnages secondaires. La plume de Mathieu Guibé si riche en émotions, si pleine de poésie conjugué à un désespoir, mêlant un amour profond, à rendu ce livre très touchant à mes yeux.

    « -Vous m'avez demandé ce que j'étais comme jouet. Je suis ce diable à ressort. D'apparence, rigide, sobre et inoffensive, une fois la boîte ouverte, le monstre jaillit, totalement incontrôlable et tellement effrayant. On peut fermer la boîte, mais le diable demeure à l'intérieur et bien qu'il soit invisible, on sait qu'il est là et l'on redoute l'effet de sa prochaine apparition. Je suis un jouet que l'on offre pour faire une mauvaise blague, je ne suis pas de ces jouets que l'on rêve de posséder étant petit fille. »

    XIXème siècle…

    Lord Josiah Scarcewillow est un vampire qui fuit l’effervescence de la ville de Londres pour retourner dans son ancienne demeure familiale, Crimson Dawn, en province. Le bruit, le monde, les ennemis des vampires ont donc quelques peu forcés Josiah de déserter tout ce faste Londonien. Josiah représente LE vampire blasé de tout, plus aucun réel plaisir ne sied à sa personne. Sous son air d’aristocrate à l’allure irréprochable, ce personnage est torturé à tel point qu’il est rempli de doutes. C’est un vampire et en tant que tel, il tue, il torture aussi, le poussant à des extrémités sombres. L’auteur nous donne les vices de ce personnage de manière froide, déterminée, mettant l’égoïsme de Josiah en première ligne durant le défilement des pages. IL est une créature de la nuit, alors pourquoi le border de fleurs bleues à outrance comme certains romans ? Ici, pas besoin de fioritures, la fluidité de la lecture, sans compter les mots employés ne font que démontrer la vraie nature du vampire crée par Mathieu Guibé et c’est tout simplement sublime. Il est vrai que la violence y est quasi permanente, donc pour les âmes sensibles s’abstenir, mais pour ma part et pour tous ceux qui ont envies de lire autre chose que de la littérature où tout est beau dans le meilleur des mondes, il faut l’avoir entre les mains.

    Ce n’est pas que le monde dans lequel vit les personnages est laid, c’est la façon de voir tout simplement réaliste du personnage principal, Josiah, que cela rend encore meilleur le texte, si ce n’est plus. Je m’explique, il parle vrai, sans tomber dans un cynisme qui serait lourd, non, c’est tout le contraire, le fait que Josiah n’attende plus rien de cette vie ne fait pas de lui un suicidaire, il est juste blasé, froid, égoïste - c’est également un point fort récurrent. Cet homme sans conscience, fort, déterminé dans ses choix, cruel, mais fragile, va vivre une histoire qu’il n’aurait jamais crue possible avec une jeune femme Abigale et c’est à partir de cette rencontre, que Josiah va changer et montrer d’autres facettes.

    Abigale, est fraîche, innocente, devenant l’obsession de ce vampire, allant jusqu’à le rendre fou, sans qu’elle n’en soit consciente. Cette jeune femme douce, si tendre et prête à donner son amour va la rendre passionnée. Par amour, elle sera capable de tout pour lui, ce sentiment d’égoïsme, elle ne connait pas, Abigale n’a de raison d’être que si elle partage, sa vie, ses sentiments, ses émotions, ses découvertes. Sa joie de vivre va donner un nouveau sens à celle de Josiah, lui redonnant le peu d’humanité qu’il avait jeté aux orties. Leur rencontre se fera d’une façon assez particulière et même s’ils sont diamétralement opposés, elle, la lumière si pure et lui, la part d’ombre ténébreuse, le monstre qu’il se décrit lui-même, une part de tendresse va l’atteindre, comme la part de violence va atteindre la jeune femme.

    « Abigale était bel et bien la seule à éveiller en moi tant d'émotions, tant d'émoi et surtout tant d'humanité. Nous ne formions plus qu'un, nos deux corps symbolisèrent bien plus qu'une simple fusion physique et sentimentale. Nous étions une entité unique, bien supérieure à la somme de nos deux êtres. Nous étions l'univers, de l'infiniment grand à l'infiniment petit, nous étions le temps, distendu et perpétuel, bref et figé. »

    Le fait qu’ils soient chacun dans un état physique bien différent, cette immortalité du Lord Anglais sera le point de départ d’une malédiction qui va les poursuivre. Le bonheur ne sera pas au rendez-vous, vous comprendrez vite pourquoi, mais qu’importe, l’humanité de Josiah qui était montré à un instant T, va tenter de disparaitre d’une certaine manière. Les remords, apprendre de ses erreurs, avoir de l’espoir, retomber dans le désespoir le plus total, redevenir celui qu’il était au début du livre pour au final se rendre compte que les actes sont bien plus important que les pensées ou les paroles. Cette obsession va donner les multiples enchainements qui se produiront, allant jusqu’à la déchéance du monstre, mais aussi de l’homme. Etre amoureux serait significatif d’être malade, pour Josiah, allant jusqu’à un certain point de perversité malsaine dans son esprit, le besoin de faire souffrir devient un réel besoin de SE faire souffrir, tuer pour au final être malade…

    « -Parce que ce manque, je le vis comme la pire des tortures. Affranchie de toutes sensations physiques, je perçois pourtant cette douleur presque viscérale à chaque instant où je voudrais pouvoir te toucher, à chaque instant où je voudrais simplement t'embrasser. Ce désir impérieux de sentir ton corps brûler en moi... Josiah, ne te mens plus, si je suis autant irradiée par cette frustration inaltérable alors je n'ose imaginer les démons qui te persécutent jour après jour. Tu en as assez enduré, tu en as trop enduré... »

     Le petit plus ? Les épilogues de chacune des parties, montrant la vision d’un autre personnage que Lord Josiah Scarcewillow. Cela permet d’en savoir plus sur certains des personnages secondaires, tel que l’un des chasseurs de vampire, Abigale bien entendu. Et en parlant de personnages principaux, j’éviterais de vous parler de la famille d’Abigale, tout comme de Maria et sa grand-mère, ils importent beaucoup dans l’histoire, mais je préfère laisser cette découverte sans y toucher, non, j’aimerais juste laisser un mot ou deux, pour le majordome, Rudolf. Cet homme à servit toute sa vie Josiah et bien qu’il soit devenu ce qu’il est dorénavant, sa propre histoire est troublante, émouvante parfois, fermant les yeux sur le caractère impulsif et les idées de son maitre, mais sans jamais bouger de sa place de majordome. Et pourtant, il me fait penser à un père pour notre vampire. Les liens entre eux sont forts et dévoilés sur le tard, mais cela n’intervient qu’à un moment donné où la peur va commencer à s’ancrer en Josiah, pour n’en ressortir qu’une fois qu’il aura accompli son sacrifice. Tous les personnages sont importants, tous ont une place importante, chacun d'entre eux est présents afin de faire avancer l'histoire d'une manière ou d'une autre, même le sdf vidé de son sang devenant un pruneau séché.

    « Je restai quelques instants appuyé contre le garde-fou, m’interrogeant sur le virage qu’avait pris mon existence. Cela faisait des siècles que je jonglais entre la sauvagerie et l’humanité qui m’habitaient, cherchant à savoir laquelle me définissait en tant qu’être. Maintenant que la réponse me sautait aux yeux et me dictait que j’étais le monstre et non l’homme, ma vie conservait-elle encore un sens ? Fallait-il que je distille plus de cadavres qu’il n’y avait de poissons dans la Tamise pour tolérer ce que j’étais ?»

    Plus je tournais les pages et plus je me demandais comment cette histoire allait bien pouvoir se terminer et la fin ne m’a aucunement déçue, puisque je ne voyais pas d’autres issues possibles. Bien entendu je ne vous en dirais pas une miette, juste que du début de la première ligne aux derniers mots qui clos ce tome, vous ne pouvez pas rester indifférent. C’est impossible, entre l’amour obsessionnel de Josiah condamné à vivre pour une éternité qui ne lui convient pas et les mots de Mathieu Guibé, vous aurez forcément des sentiments contradictoires qui prendront le pas sur votre personne. Ce livre est tout simplement magnifique, il n’y à pas d’autres mots, les décors d’un ancien temps, c’est triste, mais si beau, laissant un arrière gout de mélancolie une fois les pages complètement refermées. Magnifique et lugubre à la fois, les tortures, les sarcasmes, tout cela est oublié une fois que l’on gratte entre les lignes pour mieux comprendre cet homme.

    J’ai eut la chance de pouvoir rencontrer l’auteur au salon du fantastique 2013, à Paris et je pense qu’au vu de notre discussion, il à très bien compris que j’ai adoré son livre. Mathieu Guibé est une personne simple, très gentil et j’espère ne pas lui avoir fait peur avec mon enthousiasme pour son livre. ;) « Even dead things feel your love » est si poignant, si bouleversant, une lecture prenante émotionnellement que je ne peux que le conseiller, ce qui à été fait le jour-même à deux amies qui étaient présentes et qui ne sont pas parties sans.

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