• L'interview de Vanessa Terral

    L'interview de Lola T.

    L'interview de Vanessa Terral

    Un grand merci de bien vouloir m’accorder du temps pour répondre à mes questions.

    Merci à toi de me les poser. Et puis, tu penses, après cette super chronique que tu as faite sur L’Aube de la Guerrière, je ne pouvais qu’accepter avec empressement !

     

    Avant de parler de l’auteure, j’aimerais déjà savoir qui tu es vraiment. Qui se cache derrière Vanessa Terral ? Quels étaient tes rêves enfant ?

    Je voulais voir les fées ! (rire) Je vivais très seule, avec mon petit frère et mes parents. Nous étions tout au bout d’un lotissement, ce qui nous permettait de profiter du grand terrain jouxtant la maison. C’était de belles collines, petites mais boisées de chênes, avec un ruisseau en bas du jardin. Avec des yeux d’adulte, je pense que l’endroit ferait un peu étriqué, mais c’était merveilleux pour moi d’avoir la nature au pas de la porte. Je ressentais les arbres, les endroits particulièrement beaux comme magiques. Je pense que j’étais un peu « à côté de la plaque », dirait-on aujourd’hui. J’étais surtout très innocente, et tant mieux ! C’est ce qu’il faut pour voir les fées, paraît-il…

     

    J’ai l’impression qu’écrire est une réelle et véritable passion pour toi, peux-tu me dire si tu te souviens de ta première œuvre, publiée et non publiée. Comment les idées te viennent ? Quel est ton meilleur moment pour coucher sur papier ou écran ton imagination ? Et qu’aimes-tu rédiger d’une manière plus générale ?

    Mes premières œuvres doivent sans doute se trouver dans les feuillets d’une rédaction… Le professeur notait souvent que je m’étendais trop dans ces exercices-ci. Je me souviens d’un devoir que j’avais écrit peu de temps après avoir vu Le Roi Lion. J’avais placé le cadre dans la savane et, au final, j’avais rendu le double des pages autorisées. Le premier texte que j’ai écrit pour être lu par « des gens » date de 2001, je crois. Il s’agissait d’un jeu organisé par la bibliothèque du village où je vivais. Il n’y avait rien à gagner ; j’ai participé pour que d’autres personnes me lisent, en-dehors de ma prof et de mes parents. À peu près à cette époque, je me souviens avoir créé plusieurs nouvelles de fantastique à la façon XIXe siècle, dans une ambiance un peu hors du temps qu’on retrouve dans les enquêtes d’Hélianthe Palisède.

    À la base, les idées me viennent parce qu’un élément a fait « tilt ». Ça peut être une image, une légende, une musique, un paysage ou un rêve… Si cet élément est vecteur d’émotion, je vais avoir envie de travailler ce petit trésor et de le sortir de sa gangue pour l’exposer au grand jour. Pour les romans, il faut plusieurs éléments qui se percutent et forment un feu d’artifice : un amas d’étincelles qui vont me permettre de voyager de l’une à l’autre tout au long du récit. Bien sûr, il y a aussi les contraintes formelles, plus ou moins importantes et avec lesquelles nous sommes amenés à jouer. Si je prends l’exemple de Cinq pas sous terre, je savais qu’il fallait un feuilleton court. J’ai défini deux personnages se référant l’un à la légende des masticateurs de linceul, qui me plaisait bien et qui n’est guère utilisée dans les romans vampiriques, l’autre au chamanisme et à l’animisme. Là-dessus, une histoire est née. J’ai alors cherché une ville dont je ressentais que l’ambiance correspondrait au récit noir et violent que je portais. Toulouse s’est imposée. De là, j’ai tissé le scénario à partir du postulat de départ, des lieux et des légendes toulousains qui avaient du sens et résonnaient dans mon esprit (les éléments d’une histoire se reconnaissent entre eux ; il apparaît comme des affinités soudaines qui deviennent vecteurs d’émotion) et de la structure en cinq épisodes (je tenais à ce que chacun ait sa touche personnelle).

    Je préfère écrire la nuit, à partir de minuit, une heure, jusqu’à l’aube si je peux. Il y a dans ces heures-là un grand calme qui me permet de me concentrer au mieux et une sensation de liberté qui ouvre l’imagination. Quant à mon genre favori… L’urban fantasy, sans aucune hésitation. Je nomme plutôt ça du contemporain occulte, car je trouve le terme « urban fantasy » limité – par définition, il s’agit de récits se déroulant dans les villes alors que je n’hésite pas à placer les miens à la campagne. En revanche, ils se déroulent bien à notre époque. Question taille, je préfère les novellas et les nouvelles, mais je m’aventure volontiers vers les romans et les poèmes.

     

    Est-ce facile de travailler avec plusieurs maisons d’édition ? D’ailleurs, quel est ton parcours pour pouvoir toucher au cœur de l’édition, entrer dans cette sphère et surtout y rester ?

    Je ne vois pas où se trouverait la difficulté, et c’est enrichissant ! On découvre plusieurs méthodes de travail, on vit des ambiances et des objectifs différents… Cela me permet aussi d’interagir avec de nombreuses personnes – et c’est une joie que cette abondance de rencontres ! Bien sûr, il y a des maisons où l’on se sent un peu plus chez soi que d’autres. Les enfants de Walpurgis, auxquels j’appartiens, ont été les premiers auteurs au catalogue des éditions du Chat noir et mon premier roman est sorti chez eux. Il y a eu ces autres anthologies, ainsi que celle à venir en 2015, aux côtés de Sophie Dabat et de Morgane Caussarieu… Et j’apprécie beaucoup la ligne générale de la maison, mais aussi Cécile Guillot et Mathieu Guibé, et Sandra qui se joint à nous sur les stands, ainsi qu’Ophélie Bruneau, Anthony Boulanger, Alexandra V. Bach, Marianne Stern, Agnès Marot… Toutefois, chaque maison est unique et chaque expérience précieuse. J’ai le sentiment de ressortir plus riche de ces échanges et d’avoir fait le bon choix, de continuer à proposer mes textes à différentes maisons.

    Concernant mon chemin, j’ai pris le parcours de longue haleine : les premières fanfics postées sur Internet, puis les fanzines qu’on publie soi-même, pour basculer dans les fanzines et les webzines des autres (Borderline, L’Armoire aux épices, Bazarts’, Le Royaume des fées…). Mon tout premier texte rémunéré est paru dans l’anthologie H.P.L. 2007, aux éditions Malpertuis. J’avais encore mon nom de naissance. Puis Mathieu Coudray m’a demandé si je voulais participer aux Sombres Romantiques, chez les éditions du Riez. Il y a eu quelques soumissions aux appels à texte pour Argemmios, qui ont été acceptées, et celle pour Ghost Stories chez Asgard aussi. Bref, je me suis hissée sur le chemin avec mes petits bras d’emplumée à l’encre et je crois que c’est aussi pour ça que je garde l’ouverture de proposer des textes à plusieurs maisons : j’ai toujours fonctionné ainsi. Il y a une grande part de ce qu’on appelle « le relationnel » dans ma façon d’envisager le choix d’une maison d’édition : je préfère avoir rencontré les personnes qui s’en occupent, ou les côtoyer sur Internet depuis quelque temps – comme dans le cas du Petit Caveau. Et puis, dans tout ça, il y a évidemment le plaisir de partager autour d’une même passion, qu’on soit auteur, éditeur, correcteur, directeur de collection ou « simple » lecteur.

     

    Lors des premières ventes, quel a été ton ressenti ? As-tu toujours les mêmes émotions même encore maintenant ?

    En fait, tout c’est fait de façon très progressive – à l’image de mon parcours. Quelque part, j’ai l’impression que cela m’a flouée de cette exaltation que les jeunes auteurs ressentent lorsqu’ils accueillent le colis contenant leur premier roman. En revanche, je me souviendrai toujours de l’avant-première de L’Aube de la Guerrière à la librairie L’Antre-Monde, à Paris. Beaucoup de mes amis étaient venus, des inconnus aussi, et il y a eu une telle affluence que les stocks n’ont pas été suffisants ! Je n’ai pas vu le temps passer, et le fait de revoir mes amis (j’avais quitté Paris un an plus tôt), que le roman démarre si bien, tout cela m’apparaît aujourd’hui en un tourbillon merveilleux de joies et de chaleur humaine. Je n’ai pas eu l’occasion de revivre ça avec Cinq pas sous terre, mais j’espère que le prochain roman sera de nouveau l’opportunité d’une belle après-midi festive.

    Toutefois, même si une vente me ravit toujours (« Une personne de plus qui va découvrir mon univers ! Ouais ouais ! »), je crois que je préfère le moment où la personne revient vers moi et qu’on peut discuter du texte qu’elle a lu.

     

    Pourrais-tu décrire les différents thèmes que tu abordes dans tes œuvres pour un lecteur qui ne connaîtrait pas encore ton nom (ce qui soit dit en passant mérite une bonne… oups je m’égare (rire) ) et donc les différentes aventures de tes personnages ?

    Je vais essayer, en tout cas… Je crois que le thème principal serait la fluctuation. Pas de manichéisme, pas de frontière marquée entre notre monde et les « autres ». J’aime le concept « d’entre deux », ce que j’ai mis en forme sous le nom de « Temps gris », qu’on peut croiser dans la nouvelle Ralvn, Plumes noires au vent du Nord. J’essaie de faire en sorte que les méchants aient, quelque part, raison d’agir comme ils le font – raison à leurs yeux ! J’apprécie de pouvoir glisser de la légèreté dans une histoire, sans pour autant craindre d’aborder des vécus lourds et traumatiques. Mais j’essaie, toujours, d’éviter de tomber dans la guimauve – trop de pathos tue le pathos. Encore là, on trouve une question d’équilibre, d’entre deux. Je puise mon inspiration dans les mythologies, les légendes et le folklore. Lorsque je choisis une ville, je m’intéresse à son histoire, à ses mythes, aux faits étranges qui s’y sont déroulés, à ses lieux emblématiques – et à ceux qui m’ont tapé dans l’œil quand je l’ai visitée. J’essaie autant que possible de transcrire le(s) ambiance(s) que j’y ai ressentie(s). Le respect des autres et de la nature est également une préoccupation qui, je pense, transpire dans mes histoires. Et j’aime bien placer une touche d’humour. Certains récits, très rares, ne s’y prêtent pas, mais dès que l’un d’eux permet de se lâcher, je n’hésite pas ! Le personnage de Terrence, dans L’Aube de la Guerrière, en est un bon exemple. Mon leitmotiv est de « re-mythifier » notre quotidien et j’essaie de l’appliquer même dans mes quelques textes de SF, comme Clamatlice (du planet opera) ou Au fond des solitudes de métal et d’agate.

     

    Dans toutes les histoires, romans, nouvelles et contes que tu as écrits, quelle serait ton histoire préférée et pourquoi ? Et quel serait, pour toi, le livre qu’il faut absolument lire, si nous ne devions ne choisir qu’un seul de tes écrits ? En nous donnant tes raisons, bien entendu.

    Houlà, c’est vache, ça, comme question ! L’histoire que je préfère… Je crois que je ne l’ai pas encore écrite. Elle viendra un jour, j’ai confiance, mais pas avant quelques (dizaines d’) années. Il y a des éléments d’elle dans la plupart de mes récits, mais je ne suis pas prête, en tant qu’être humain et en tant qu’artiste, à la créer aujourd’hui.

    L’Aube de la Guerrière me semble l’œuvre la plus représentative, à ce jour, de ce que je fais. On y trouve la plupart des éléments que j’ai cités à la question précédente et elle est vraiment née d’un élan de vie : grâce à une scène-clef, j’ai été portée par les émotions tout au long de l’écriture. Cinq pas sous terre, écrit à une époque plus sombre de ma vie, contient une noirceur assez forte – or, celle-ci est plutôt exceptionnelle par rapport au reste de mes œuvres. Heureusement, l’épisode bonus ramène un équilibre in extremis.

    Et pourtant, pour des raisons bien différentes et alors qu’il n’est, lui, guère représentatif du reste de mes créations, j’aimerais conseiller à tout un chacun le mini-recueil numérique Les Vagues de Clamatlice. Je préfère ne pas dire pourquoi et laisser les gens le découvrir… (Mouarf arf arf, je suis méchaaaaante !) Il se lit vite et coûte 1 euro. Et franchement, je crois qu’il parle mieux de moi et de ma façon de voir le monde que toutes les questions auxquelles je pourrais répondre.

     

    Une question encore plus difficile, quel est ton personnage préféré de tous les personnages que tu as créés et pourquoi ? (Je suis gentille, tu peux en donner plus d’un vu le nombre de livres écrits. :p )

    Merci à toi, ô grande prêtresse de cette interview !  ;-)

    Pour la complexité et la richesse du personnage, je dirais Hélianthe Palisède. Elle se tient à la frontière entre l’éthique humaine et l’inhumanité de son héritage. Par devoir, elle a choisi de vivre dans la marge, condamnée à être seule pour toujours et néanmoins animée par le souci de résoudre les problèmes liés à l’apparition des fées dans notre monde – donc, venant en aide aux humains sans pour autant agir par altruisme. Isolée, quasi-sociopathe et pourtant perçue comme une bienfaitrice par ceux qu’elle secourt… Elle a parfois du mal à jongler sur le fil ténu de son identité.

    Dans L’Aube de la Guerrière, je pense de suite à Bel (parce que c’est Bel : ça ne s’explique pas, ça se lit) et à Helena, pour laquelle j’ai beaucoup d’admiration (eh oui, on peut admirer un de ses personnages !). C’est une survivante, elle se bat contre l’inéluctable, contre la folie qui l’emportera un jour et sa vie misérable de fugitive. En tant que nephilim, elle sait que la puissance divine qui l’habite la consume de l’intérieur, mais elle « fait sa part », tenace, vaillante bien que sans espoir. Disons que ce n’est pas pour rien que j’ai consacré à ces deux-là une nouvelle spin-off dans l’anthologie Saisons païennes.

    Si une planète peut être un personnage, je citerais Clamatlice, pour sa beauté et la sérénité qu’elle apporte à ceux qui la visitent, ses habitants fictifs comme ses lecteurs bien réels – et à moi, lorsque j’y vis les aventures de ses petits héros.

    Enfin (oui, je sais, j’abuse de ton autorisation), il y a Manu – très peu connue, pour l’instant. C’est un personnage qui m’habite depuis longtemps, en témoignent les nouvelles qui la mettent en scène dans Ainsi commence la Nuit. Ce recueil ne présente pas tout à fait la version que je compte exploiter, mais je sais que j’écrirai bientôt le premier tome d’une série dont elle sera l’héroïne. Pourquoi Manu ? Quand j’y réfléchis, elle ressemble beaucoup à Helena : même s’il n’y a pas d’espoir, elle essaiera parce c’est ce qui doit être fait. À l’inverse de la nephilim, elle possède encore une part de naïveté et a désespérément besoin d’être entourée d’amis, d’une « famille ». Ça la rend tellement… mignonne ! Beaucoup de lecteurs m’ont dit qu’ils avaient été touchés par la Manu d’Ainsi commence la Nuit. J’espère que la Manu des romans, même si elle évolue dans un contexte différent, parlera autant aux gens.

     

    Quelles sont les scènes présentes dans ton esprit, que ce soit au niveau de la facilité d’écriture, mais l’inverse également ? Quelles sont celles que tu as apprécié dévoiler aux lecteurs et d’autres peut-être un peu moins ?

    Les scènes d’action sont toujours une gageure. Il faut réussir à garder le côté dynamique tout en permettant au lecteur de bien visualiser ce qui se passe. Il faut aussi la jouer parfaitement dans sa tête afin que ce soit réaliste. On peut dire que les scènes chaudes présentent les mêmes soucis, avec la gestion des émotions en plus. Mais ce sont des défis assez plaisants, au final (surtout au final, une fois que lesdites scènes sont bouclées !). Les dialogues entre des personnages que je maîtrise sont un réel moment de bonheur. Ils semblent couler de source, souvent s’y glisse une pointe d’humour, je m’amuse beaucoup ! En revanche, je rame pour les « raccords », ces passages qui font le lien entre deux moments forts du scénario et où il ne se passe pas grand-chose à part que l’action avance. Dans ce cas-là, je me force vraiment à écrire et c’est d’autant plus délicat qu’il ne faut pas que les gens ressentent cet ennui lors de leur lecture.

    Quant aux scènes que j’ai apprécié écrire… Pfiouuuu, mais c’est pire que la question sur les personnages ! Il y a des scènes qui m’ont marquée et qui vivent encore en moi. Étrangement, la première à laquelle je pense est le choix d’Hélianthe pour sauver sa cliente, à la fin des Flûtes enchantées, dans l’anthologie Le Lamento des ombres. Parce que cette décision caractérise le personnage, mais est aussi un vrai drame : elle choisit de mettre son humanité de côté pour faire rapidement le choix le plus pertinent. Ce n’est dit qu’entre les lignes, néanmoins elle vit un réel déchirement à ce moment-là. Je ressens aussi l’urgence d’Inch’Allah qui ne comprend pas ce qui se passe mais est bien décidée à sauver son amie. Une autre scène qui vit en moi est le moment où tout semble perdu dans L’Aube de la Guerrière, alors qu’Aghilas affronte deux Larves à lui seul et que Solange est sur le point de s’éteindre définitivement. Je crois que j’ai une affection particulière pour ces moments-là, les points de bascule, quand tout semble désespéré et que l’un des héros puise en lui des ressources insoupçonnées. Et aussi ces moments où l’on fait des choix importants, ou l’on prend de ces décisions qui influencent toute une vie. Je pense là à Luccine qui brandit une pierre pour tuer un escargot, dans Saison de pluie sur Clamatlice – et un peu plus tard, quand elle décide de pénétrer dans la maison abandonnée. Il s’agit de scènes extrêmement fortes et riches en termes d’émotions et je crois que c’est pour cela qu’elles se sont implantées en moi avec tant de vigueur.

     

    Comment prends-tu les avis des lecteurs ? Que penses-tu de ce qui se dit sur les blogs ou en dehors, de la façon dont les personnes qui ont pu t’approcher, que ce soit lors de salon, de dédicaces, par d’autres moyens de communication… Comment vis-tu tous ces instants ?

    J’adore lire des retours sur mes textes ! Oui, même les critiques négatives – enfin, après un bref instant de déprime. Chaque chronique me rappelle pourquoi j’écris : pour partager ; et voir, entendre des personnes partager à leur tour se place dans une merveilleuse continuité du cercle. Je relis les chroniques plusieurs fois dans la journée, c’est un peu mon « joyeux non-anniversaire » dans ce moments-là. Pour les avis négatifs, c’est plus compliqué à gérer : soit elles sont complétées d’une argumentation que j’étudie et mémorise – et je me dis que je ferai mieux la prochaine fois, en prenant en compte ces faiblesses afin de les travailler –, soit elles sont jetées sans explications et là, il est compliqué de savoir pourquoi la personne n’a pas aimé. Un jour, en allant plus loin dans la discussion (une autre chroniqueuse s’était étonnée de la réaction d’une lectrice), j’ai découvert que cette dernière trouvait que Cinq pas sous terre n’était pas bon parce que l’héroïne est d’origine maghrébine et que je ne parlais pas de l’Islam ni de sa potentielle appartenance à la religion musulmane… Dans ce cas, je respecte le fait que la personne n’ait pas aimé mon roman (les goûts et les couleurs… tout ça tout ça !), mais il s’agit d’un avis idéologique plutôt que stylistique ou de pertinence scénaristique. Donc, à vous qui lisez ceci : si votre avis est négatif, dites-moi pourquoi ! C’est là le réel intérêt d’une discussion : échanger et permettre aux parties de s’améliorer – et, souvent, de faire vivre une passion.

    Mais bon, le meilleur reste quand même les discussions lors des salons et des dédicaces. Rien ne vaut d’avoir la personne en vrai devant soi : la conversation est plus naturelle, on peut partir sur des sujets qui n’ont rien à voir… Et, quand une lectrice ou un lecteur a vraiment, vraiment aimé l’une de mes œuvres, la chaleur de son affection rayonne d’elle. C’est une telle bénédiction, cette émotion, pour un pauvre petit auteur inquiet et grelottant, qu’elle suffit à embellir tout un salon, voire des semaines entières. J’ai le souvenir ému d’une personne avec qui j’ai discuté lors du Salon fantastique et qui était tellement dans L’Aube, qui vivait tellement les personnages, l’action, qu’elle a transfiguré mon roman sous mes yeux. Et ça, c’est juste magique. En y repensant aujourd’hui, alors que des mois se sont écoulés, j’ai encore le cœur qui bat fort et un sourire sur les lèvres. Pour moi, ces lectrices et ces lecteurs sont mes petits anges gardiens.

     

    Je suppose que tu as d’autres projets, peux-tu ou as-tu le droit d’en parler un peu, beaucoup ? Peux-tu nous donner un extrait du prochain chapitre en cours ? ( (rire) Qui ne tente rien n’a rien !)

    Eh bien, je devrais avoir deux nouvelles à paraître dans des anthologies, cette année. Une chez Argemmios, dans Le Butin d’Odin, et l’autre… Là, je ne peux rien dévoiler. Courant 2014, j’écrirai une novella à paraître aux éditions du Chat noir en 2015 et sans doute une nouvelle histoire se déroulant sur Clamatlice. Enfin, une novella de romance paranormale est actuellement en quête d’un éditeur.

    Sinon, le roman sur lequel je travaille en ce moment est Nuits chthoniennes, qui a sa propre page FaceBook (j’en crée une par roman). Il s’agit encore une fois d’un one-shot, en « garrigue fantasy » ! Colline apprend que Sefana, sa meilleure amie, a disparu et part à sa recherche dans l’arrière-pays tropézien. Elle tombe alors sur un nid de vampires. Elle essaie de s’en tirer par la ruse, car ses petits dons pour la magie des pierres ne font pas le poids face à ces monstres. Enfin, ça, c’est ce qu’elle croit… Heureusement, deux vampires semblent différents des autres – d’ailleurs, ils rejettent ce terme. Pour sauver son amie, Colline devra démêler un joli sac de nœuds qui remonte à l’époque pré-chrétienne, sur les îles britanniques.

    Et, comme j’en suis au début, révéler un bout du chapitre en cours ne me pose aucun souci !

     

    « Je soufflai sur chacune des pierres et les embrassai pour les remercier de m’avoir répondu. J’avais l’âme en coton. Mes doigts s’agitaient sans que mon esprit soit présent ; je rangeai mon matériel dans un état second. Mes jambes me traînèrent hors du lit. J’allais jusqu’à la salle de bains, mais en sortis très vite. Je n’avais rien à y faire. Un tour dans la kitchenette me poussa à nettoyer les reliefs du petit déjeuner et à laver les couverts, le verre et la tasse. Puis ce fut au tour du salon d’accueillir mes allées et venues. J’attrapai un magazine, le posai. La télé s’alluma, puis s’éteignit après un zapping mécanique. L’idée me vint de méditer afin de chasser le collet qui me serrait la gorge un peu plus à chaque minute, menaçant de m’étouffer. À peine assise sur le tapis au pied de mon lit, je sus que c’était une mauvaise idée. Il y avait cette chose au fond de mon thorax qui refusait de se calmer et s’agitait plus encore lorsque je me tenais immobile. Je bondis, revins au salon. Mes pas évitaient soigneusement la chambre de Sefana – grand trou noir par ses volets clos, mais pas que. Le cagnard de midi commençait à pénétrer dans l’appartement. Je fis le tour des pièces pour en fermer les fenêtres. M’agiter me donnait chaud et mon corps n’était clairement pas fait pour supporter ça – disons que j’avais l’organisme assorti à ma peau fragile de petit cochon rose. Cheveux trop pâles, iris trop clairs… Sefana avait fait peser toute notre amitié dans la balance pour que j’accepte de la suivre dans cette région inhospitalière. Je retournai dans la salle de bains, décidée à baisser ma température d’un degré. Sans allumer la lumière, j’attrapai mon gant de toilette et le passai sous l’eau fraîche. Sa caresse sur ma nuque me fit un bien fou. Mes poignets et mes avant-bras se succédèrent sous le robinet. Le froid liquide se communiqua directement aux fines veines qui couraient là. Avec une lenteur exaspérante, comme à regret, la pression agressive de la chaleur se relâcha un peu. Je soupirai, soulagée. Je baissai la garde. Dans le miroir au-dessus du lavabo, malgré la pénombre ambiante, je croisai mon regard. Mon esprit se brisa. Je m’effondrai, m’accrochant à la faïence davantage pour freiner mes émotions que ma chute. Les larmes débordaient sous mes cils. Elles tombaient, tombaient encore, à gros bouillons, tandis que les sanglots me secouaient les épaules. C’était ma faute. Les pierres l’avaient dit : on n’aurait pas enlevé Sefana si elle ne portait pas le collier. Ma faute. J’avais trahi mon amie, ma seule amie. La seule personne en qui j’avais confiance, que j’aimais – et à cause de moi, elle avait disparu. Qu’est-ce qu’on lui faisait subir ? Combien de temps la garderait-on en vie ? Les horreurs qu’elle vivait en ce moment, alors que je profitais tranquillement de l’eau fraîche et du confort de l’appart’, j’en étais l’unique responsable. Comment pourrais-je être tranquille ne serait-ce qu’un instant ? Je devais la retrouver au plus vite.

    Alors que mes pleurs continuaient à se déverser, criant ma honte et mon désespoir, je formais l’ébauche d’un plan. Dès que j’aurais accompagné Léa au commissariat, je me rendrais aux Caves du Prince et je découvrirais moi-même ce qui s’y était passé. »

     

    Je te laisse les dernières lignes pour terminer ce moment.

    Merci – et merci encore pour m’avoir donné l’occasion de m’exprimer sur mes œuvres et sur le processus de création.  :)

    Nina Simone aurait dit, paraît-il : « Un artiste a le devoir de représenter sa génération. » J’espère, quelque part, représenter les aspirations d’une partie de la mienne. Sans négliger un petit côté savage punchy, évidemment ! ^__^

    À vous qui m’avez lue jusqu’ici, merci.

    Prêts pour repartir à l’aventure ?  ;-)


    Pour ma part, c'est un GRAND OUIIIIIIII !

    Je terminerais par un Très Grand MERCI pour toutes tes réponses, d'avoir joué le jeu et d'avoir autant donné de toi, autant de sincérité, autant de petites choses qui font que pour ma part, j'ai été plus que comblé en lisant tes mots, certains passages évidemment.

    Je ne reviendrais pas sur tout, ne voulant pas perdre tout le monde en chemin non plus, mdr, mais je tenais à dire que non, mes questions ne sont pas vaches, seule la personne qui les pose est sadique (je croyais que tu le savais depuis le temps, niark niark niark)

    Bel est LE personnage qu'il faut lire comme tu l'affirme si bien, car pour l'expliquer, c'est... inexplicable. Et "l'aube de la guerrière" est un très bon livre (quoi? Je n'ai pas le droit de faire de la pub? mdr, dommage c'est fait! :p D'ailleurs, cliquez sur le titre, là au-dessus, vous tombez sur ma Chronique coup de coeur)

    J'avoue ne pas avoir tout lu de toi (oui, oui, honte à moi ^_^ mais cela peut bien être autorisé pour une prêtresse non??), mais je me suis rattrapé depuis, quelques unes de tes oeuvres sont posées les unes sur les autres dans ma bibliothèque et je n'ai pas pu résister au fait de me procurer "Les vagues de Clamatlice". (Non mais oser dire que tu ne dira rien dessus, comment veux-tu que je résiste à cela? xD)

    Merci pour ces moments privilégiés, cela me touche énormément et si vous, lecteurs assidus avez été jusqu'au bout, vous ne pouvez que vous dire que Vanessa Terral à un coeur en or, généreuse autant en gestes qu'en paroles : un vrai petit bout de femme qu'il ne faut pas passer à coté ;)

    Rendez-vous en Mars 2014 Miss !



     

     

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  • Commentaires

    2
    Samedi 1er Février 2014 à 23:27

    Méchant Ekla qui ne m'a pas dit que tu avais écrit ><

    Hum, j'oublie volontiers ta première phrase, mon fouet n'est pas en cuir, mais euh, hum bref, passons !

    Tu ne peux pas imaginer à quel point j'adore te lire, même si je dors entre deux tout de même et tes réponses si complètes, je suis aux anges! (Oui, je retourne à l'aube xD)

    Merci du compliment pour la tenue du blog et disons que je ne sais pas moi-même comment je fais, dédoublement, ça ne peut être que cela, vu la surface, c'est plausible, mdr. Concernant ma fameuse Pal, déjà, faut que je le récupère sur mon satané pc qui fait des siennes, mais je l'aurais un jour, je l'aurais xD et je ne t'oublierais pas pour autant

    Par contre, dernier point, pas sur que ne rien dire fasse acheter, mais je sais que ce que tu écris, je dois en avoir un bon nombre dans ma Pal qui attends que je les libère de leur pseudo poussière.On se demande pourquoi j'en ai autant d'ailleurs, ^^

    Merci à toi et à très bientôt!

    1
    Lundi 27 Janvier 2014 à 02:22

    Je t'en prie! Puis merci pour cette réponse, je suis heureuse que mon témoignage t'ait intéressée et plu à ce point. 


    Pour ce qui est du sadisme… Il paraît que ce genre de personnes aiment le cuir, donc on retrouve le thème de la vache, quelque part, non? 


    Tout à fait, pour le droit à ne pas avoir tout lu: une prêtresse doit s'occuper de son temple et je suis certaine que ton blog t'en prend beaaaaaaucoup (je suis toujours impressionnée par les gens qui parviennent à poster régulièrement). J'espère que les œuvres qui se sont rajoutées à ta PàL te plairont. Alors comme ça, dire qu'on ne dira rien d'une histoire, ça fait acheter? Je note, je note… 


    Le rendez-vous est pris et attendu! 


    Encore merci!

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