• Les yeux d'Iris (Magali Collet)

    Les yeux d'Iris (Magali Collet)

     Résumé 

     

    « Un meurtre et un suicide.
    Trois hommes. Trois femmes.
    Des retrouvailles.
    Un pacte.
    Tout se paye, même l'amitié.
    »
         
     
    Un autre livre de l'auteur ? C'est avec : La cave aux poupées
     

     Ma chronique 

     
    Je remercie Joël ainsi que la maison d'éditions Taurnada pour cette nouvelle lecture.

     

    On ne peut pas plaire à tout le monde, on ne peut pas s'amuser avec tout le monde et faire un pacte avec des amis peut être amusant jusqu'à ce que ce pacte soit remis en cause et que la vie future de chacun d'entre eux dérape. Comment débuter ma chronique ? C'est la question que je me pose depuis que j'ai refermé le livre, non pas parce qu'il est mauvais, bien au contraire, mais plutôt parce qu'il y a tellement de choses à en dire dans le bon sens (je précise de nouveau au cas où) que je ne veux pas donner de détails qui pourraient vous raconter l'histoire. Je me souviens de mes années d'étudiante où nous pensions que nous serions toujours les meilleurs amis du monde, que nous ne nous lâcherions pas quoi qu'il se passe. ET puis la vie en a décidé autrement, le temps fait son œuvre, les heures deviennent des jours, des mois, des années et cette amitié forgée dans des circonstances particulières s'étiolent. Pour autant ce n'est pas l'envie qui manque, mais plutôt la peur de se sentir rejetée bien des années après, et si ? Et si au final tout redevenait comme avant ? Et si un jour le coup de fil arrive et que ce besoin, cet appel à l'aide se fait, serais-je présente ? La réponse est oui, pour tout un tas de raisons, oui je serais capable d'arriver, pas la bouche en cœur, mais avec mes moyens pour aider, pour comprendre, pour être présente. C'est là qu'intervient Morgane qui a fuit bien des années avant, suite à plusieurs drames, dont le suicide de sa sœur ainée, Iris. Un drame qui n'a pas été le seul déclencheur, mais dont je tairais ici les maux répercutés sur toute une bande d'amis.
     
     
    Morgane est pétillante, vive, adorant croquer la vie à pleine dents, mais ce n'est qu'une façade, elle cache ses remords, ses regrets, ses non-dits et cette peur panique de ne pas avoir su dire les mots qu'il fallait à sa grande sœur. Ce n'est que le haut de l'iceberg, la vie entre eux tous n'a pas été simple, je ne parle pas d'enfance malheureuse, bien au contraire, mais cette perte tragique n'a pas été le seul élément déclencheur qui les a tous perdus. Comment continuer à vivre en sachant ce qu'ils ont fait, ou plutôt non pas fait ? Fred, le frère de Morgane et d'Iris par conséquent s'en veut depuis des années pour des mots qu'il a pu dire, des expressions, des gestes qu'il ne voulait pas, mais qui ont été mis en évidence. Cela tiraille le corps entier de ne pas pouvoir se confier à ses parents, cela tiraille encore plus lorsque les phrases sont dites. Les regards qui suivent, les absences, les silences et le destin qui s'en mêle une fois de plus. Plus rien n'est simple lorsque la culpabilité a fait son chemin et s'est installée pour ne plus partir. Cette culpabilité qui ronge telle une gangrène jusqu'à l'os et vous fait faire des gestes inconsidérés. Fred en fera les frais, sa vie n'a plus aucun sens, il ne sait plus vivre, il ne fait que survivre malgré son boulot de flic. Et depuis ces nuits-là, depuis ces morts physiques et mentales Fred est celui qui ne pense plus à lui, il ne fait que penser à garder sa sœur en vie, à s'occuper des autres quoiqu'il en coute.
     
     
    Un pacte, c'est plus qu'une simple promesse, c'est revenir d'entre les morts pour assouvir un besoin et ici il s'agit d'une vengeance bien particulière. La santé mentale des personnages est forte, la dépression est montrée d'une certaine manière. Sans s'en rendre compte les mots vont faire mal, l'envie de souffler un peu, de passer un examen ou de sauver un couple passera avant ce qui se passe dans la tête de l'autre. Et c'est là que tout se complique. Moi, moi, moi, le "je" deviens un élément non pas d'égoïsme, mais de survie. Il est clair que lorsque l'un de ses drames (mort, viol, violence conjugale, violence psychologique et bien d'autre encore) est présent, c'est tout un monde qui s'écroule et la survie sera la première. Il ne s'agit pas de sauver l'autre, il s'agit de se sauver soi-même quitte à faire un pacte avec le diable lui-même. Un moment clé dans la vie de Julie, Fred et Morgane qui vont devoir se retrouver pour assouvir une vengeance, celle de tenter de sauver une âme perdue en chemin. C'est long, douloureux, les années ont passé et les choix de chacun ont eu un impact sur les autres. Un amour perdu, une vie gâchée, un soupir d'horreur, des images qui ne s'enfuient pas qui restent bien ancrées en mémoire. Qu'est-ce qui fait le plus mal : se souvenir de ce que l'on a fait, de ce que l'on a subit ou fait subir, ou vivre comme l'un d'entre eux l'a fait pour obtenir réparation ? Comment réussir à surmonter cette douleur qui n'est plus que cette force qui vous donne l'envie de vous lever le matin pour continuer ?
     
     
    La vengeance est un plat qui se mange froid, glacial et certains actes, certaines attitudes sont étranges, mais arrivée au bout de l'histoire, les pièces du puzzle sont toutes là et ce qui s'installe dans notre esprit n'est rien de plus qu'une satisfaction malsaine de savoir que ce pacte sera accompli coute que coute. Trois hommes et trois femmes seront de la partie, Julie, Fred, Morgane, mais aussi Audrey, Mickael et Bastien. Des frères et sœurs, des amis d'enfance, des amants de passage, des compagnons de maintenant, des familles pour d'autres et pourtant le Mal ronge. Il est insidieux tel un serpent qui va vite se rendre compte que se mordre la queue n'était rien comparé à ce qui va lui tomber dessus. Tout le monde a une vie avant, tout le monde a des secrets plus ou moins lourds à porter. La dépression d'un être touche tout le monde, déjà celui qui la prend en pleine face pour une raison qui le touche profondément et ceux qui l'entoure. Cet état n'est pas simple à gérer, ce n'est pas en donnant des cachets ou en tapotant des doigts l'épaule que cela va fonctionner. Une vraie dépression c'est cet état permanent même après la première chute, le mal-être qui nous englobe qui est tenace et ne lâche pas. La moindre défaillance, le moindre soupçon sur ce que nous pensons de nous et la rechute est proche. Nul ne se rend vraiment compte de ce qui se passe autour et oui, l'égoïsme est bien là, parce qu'il n'existe plus rien que ce mal qui s'est engouffré et qui ne part jamais totalement.
     
     
    Les mots tout comme les gestes mal accomplis font mal, sont douloureux et les maux du corps deviennent ceux de l'âme. L'auteur nous indique à plusieurs reprises que certains personnages sont morts à l'intérieur et cela s'en ressent. Une vie pour une vie, vont-ils être capable d'aller jusqu'au bout ? Les thèmes sont forts et poignants, pas toujours "corrects" dans le sens où certains actes m'ont parus énormes, mais nul ne peut se mettre à la place de l'un des personnages. Personne ne peut vraiment dire ce que nous aurions fait à leur place. Être victime ou ami de la victime, ou bourreau, nos réactions sont propres et derrière un écran ou en tenant le livre nous nous disons non, mais là c'est pas possible, mais sur le tas, celui-là même où nous ressentons vraiment cette douleur, cette vengeance, cette dépression, serions nous les mêmes alors ? L'auteur nous montre un état extrême d'une victime qui a souffert et fait souffrir et ne s'arrête pas là. Chaque acte, chaque parole a des conséquences, entrainant d'autres parles et d'autres actes. Un engrenage qui ne s'arrête pas si on n'y prend pas garde. Les yeux d'Iris sont un moyen de se souvenir de son état, de voir au travers le regard des autres, de mieux comprendre la douleur ou du moins de la percevoir. Aider au dépends de soi... Morgane va le comprendre très vite, mais pour protéger son frère, que ne donnerait-elle pas ? Tous deux sont fidèles à eux-même et ne veulent absolument pas que l'autre soit au courant des gestes inconsidérés qu'ils ont ou vont faire. Protéger au péril de sa vie devient plus supportable lorsque l'on doit oublier de prier.
     
     
    Le sentiment de culpabilité est fort pour une bonne partie des personnages et le pire dans tout cela ? C'est que chacun est responsable à sa manière, mais aucun n'a tenu le cachet, la photo, le tissu, peu importe. Ils ne sont responsables dans leur tête parce qu'ils pensent avoir raté un élément clé. Des circonstances qui ont été mis dans leur tête. Une pierre à la fois, un élément clé à la fois, avec les flashbacks qui nous prennent aux tripes sans que nous ne puissions rien y faire. Le mal-être des uns est capable d'enfoncer celui des autres. La victime devient juge, jury et bourreau à moins que l'éclat perdu dans les regards va donner le coup de pouce du destin ? Ne pas réussir à vivre correctement tant que tout ne sera pas fini, ce pacte aura détruit bon nombre de vie et même avant cela. Les amitiés fortes, les amours perdus tout cela est balayé en un instant lorsque le Mal qui n'a eu de cesse de montrer un visage angélique fait surface. On dit souvent que les yeux sont le reflet de l'âme, dans ce récit nous comprenons parfaitement que le vide sidéral n'appartient pas à l'âme qui s'est évaporée. Les questions du pourquoi sur soi et non sur les bourreaux sont terribles car véridiques : quelle femme n'a jamais pensé que c'était sa faute ce qui arrivait alors que ce n'est que l'esprit malsain de l'autre qui se prend pour le sexe fort ?
     
     
    En conclusion, un roman qui ne laissera pas indemne une fois de plus. C'est glauque surtout les flashbacks qui nous entraînent dans un esprit qui a été torturé. L'intrigue qui semblait si facile est bien plus complexe qu'elle n'en a l'air. Oui, il est question de vengeance, oui il est question de souffrance, mais jusqu'où serions-nous capable d'aller pour se sentir en paix ? Une histoire forte avec des thèmes qui nous touchent tous car c'est bien plus que des phénomènes de société. Les yeux d'Iris nous hantent et ne nous laisseront pas en repos, car nous connaissons tous au moins une Iris dans notre vie.
     
     

     Extrait choisi :   

     

    «— Tu entends ce que tu dis ?
    — Oui et tu devrais le comprendre toi aussi. On n'est pas dans un film, Morgane. Nous ne sommes pas des "anges vengeurs". Rien ne nous lie. Nous sommes adultes et avons notre vie. J'en ai une en tout cas et je ne laisserai personne mettre en péril ma famille. C'est le message que je tiens à lui faire passer et à toi également. Les serments de sang, les promesses d'ados attardés c'est terminé.
    Alors, quand nous nous retrouverons au chalet ce week-end, ce sera la première et la dernière fois. Ensuite je ne veux plus vous revoir... »

     

    Les yeux d'Iris (Magali Collet)

     

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  • Commentaires

    6
    Samedi 19 Février 2022 à 23:03
    Il me tente bien, pour une période où je me sentirai au top pour lire des lectures si dures ;-)
      • Dimanche 20 Février 2022 à 10:22

        Je peux tout à fait le comprendre :)

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    5
    Vampilou
    Samedi 19 Février 2022 à 22:15
    Pour ce côté impactant et difficile dont tu parles, ça me plaît forcément !
      • Dimanche 20 Février 2022 à 10:22

        J'espère qu'il te plaira autant qu'à moi :)

    4
    Magali Collet
    Samedi 12 Février 2022 à 14:28
    Bonjour, Que dire... Vous avez senti, saisi, tout ce que j'avais voulu dire à travers ce thriller et je vous en remercie. Infiniment.
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